Minute autographe (Archives de l'Académie des sciences, Paris, coll. Bertrand, carton 1)

LETTRE A51.03   |   [fin 1751]
D'Alembert (Paris) à Argenson René Louis (Paris)

Folio :

Epitre
à Monseigneur le marquis d'argenson
Ministre d'etat.

Mgr. les savans et les ecrivains celebres qui vous approchent en si grand nombre, applaudiront à l’hommage que je vous rends. Le respect qu’ils vous témoignent est d’autant plus sincere, que l’attachement en est le principe, et d’autant plus juste, que vous ne pensez pas à l’exiger. Vous devez, Mgr. sentiment si flatteur et si vrai, à cette familiarité sans orgueil avec laquelle vous accueillez les talens, et qui seule peut rendre la societé des grands & des gens de lettres egalement digne des uns et des autres. Votre commerce, utile et agreable par une etendüe de connoissances qui vous assure le suffrage de la partie la plus éclairée de notre nation, est encore pour tous ceux qui vous environnent une leçon continuelle de modestie, de candeur, d’amour du bien public, et de toutes les vertus que notre siecle se contente d’estimer. Philosophe enfin dans vos sentimens & dans votre conduite, vous joignez à cette qualité trop rare et qui en renferme tant d’autres, le merite plus rare encore de l’avoir sans ostentation. Puisse votre exemple, Mgr. et celui de votre illustre maison, apprendre à la plûpart de nos mecenes, trop multipliés aujourd’hui pour la gloire et le bien des lettres, que le vrai moyen d’honorer le merite en le protegeant, est de l’honorer soy même par la maniere dont on le distingue. Je suis avec un profond respect &c