Les Œuvres complètes de D'Alembert (1717-1783)

Série V | Correspondance générale

Sélection de lettres

LETTRE 55.23   |   [27 décembre 1755]
D'Alembert (Paris) à Tressan (Toul)

Version affichée :

f. 1rVous recevrez probablement cette lettre, Monsieur & cher confrère, en meme temps que celle que j'eus l'honneur de vous ecrire hier. J'ai envoyé votre lettre à M. Rousseau, & je vois par sa reponse, que je ne luy ay nullement dictée, qu'il se conduit comme j'aurois fait à sa place, & que je me suis conduit de mon côté comme il aurait fait s'il eut été à la mienne. En qualité de son ami j'ai du vous exciter à demander justice pour lui, en qualité de philosophe, il desire qu'on pardonne à celui qui l'a insulté, et je suis tout à fait de son avis. Peut etre ce procedé corrigera til l'auteur plus f. 2r efficacement que tout le mal qu'on pourroit lui faire, qu'il employe ses talens, s'il en a, à quelque chose de meilleur et de plus honorable qu'à de mauvaises satyres. Ceux qui se sont si indecement déchainés contre M. Rousseau apprendront du moins par là que sa facon de penser n'est pas moins estimable que ses talens, que nous avons fait tous ce que nous devions dans cette affaire, et que nous nous reunissons, comme de raison, avec l'offensé, au parti de la douceur et de la moderation. Je vous embrasse de tout mon cœur.

D'alembert

ce 27 Dec. 1755.

P. S. Ne lisez au Roi dans ma lettre que l'endroit qui le regarde, je ne veux point nuir à Fréron, ni à d'autres, je n'ai point envoyé votre lettre à Made. de la Marck, parce qu'il ne faut pas oter le pain à Palissot, mais elle n'ignorera pas la manière dont M. Rousseau s'est conduit & que j'approuve extrêmement.

f. 2vA Monsieur
en diligence
Monsieur le Comte de
Tressan, commandant pour
le Roi
à Toul