Sélection de lettres
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    [Manuscrit autographe] (affichée) | |||||
Manuscrit passé en vente aux enchères à Paris, Hôtel Drouot (Thierry Bodin expert), 22-23 mai 1995, nº 2. Coll. privée, Paris MLM, 2011 (source : photocopie Groupe D'Alembert)
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D'Alembert (Paris) à Crequÿ (Froullay) Mme (Paris)
Quelle que soit l’année, la lettre ne peut être écrite pendant les vacances de l’Académie, du 5 septembre à la rentrée de la Saint-Martin, le 11 novembre à peu près. « L’été de la Saint-Martin » n’étant pas toujours au rendezvous, la plaisanterie sur le temps pourrait bien être de mise mi-novembre, époque de sermons (petit carême), où « le printems » semble encore loin. L’allusion au « papier execrable » précède de peu celle de la lettre 52.17, datée, également sur des hypothèses, de la seconde quinzaine de novembre 1752, et la lettre 53.02 datée, avec plus de certitude, de c. 15 janvier 1753, où D’Alembert ironise sur le « beau papier » de Mme de Crequÿ. De plus, le reproche de ne lire « plus que des sermons » est à rapprocher de la lettre 52.14a qui ironise sur sa tendance à la « beatification ». Autre allusion, « la lettre de Voltaire », qui pourrait être la fort flatteuse 52.10, du 5 septembre 1752, où Voltaire écrit : « Vous et Mr Diderot vous faites un ouvrage qui sera la gloire de la France, et la honte de ceux qui vous ont traversez ». La référence à l’Académie est à celle des sciences, et non à la française où D’Alembert n’entre que fin décembre 1754, peu avant la rupture de Mme de Crequÿ avec les encyclopédistes, datée de 1755 (Leigh, III, p. 173). L’Académie des sciences a plus de raisons que la française d’exiger la présence de D’Alembert un samedi : lectures de mémoires, de rapports ou commissions. Si l’on admet que D’Alembert envoie cette lettre à la marquise peu après l’avoir reçue et lui en avoir parlé, la rentrée ayant lieu le samedi 18 novembre 1752, la lettre à Mme de Crequÿ peut avoir été écrite à la mi-novembre 1752..
f. 1rVoilà, madame, la lettre de Voltaire. Vous pouvez meme si vous voulez, la garder mais ne la faites voir à personne. J'etois hier dans les rües par le beau tems, le beau chien de tems qu'il faisoit. Je me porte à merveilles. Mais sobrii estate dit St. Paul, c'est a dire soyez sobres. Voila ce que je prendrois pour le texte d'un sermon, si j'en fais jamais ; car puisque vous ne lisez plus que des sermons, je suis bien tenté de ne plus faire aussi que des sermons, mais il faudra pour cela attendre le f. 1v printems : car l'Ennui de faire un sermon & l'ennui du tems qu'il fait, sont de trop quand ils marchent ensemble. Voila toujours une Ecriture & un papier execrables. Mais je ne scaurois vous ecrire trop bien que je vous aime, que je vous adore, et qu'à Malte, à Pezenas, ou à l'isle de Tinian, je ne desirerois rien avec vous. N'avez vous rien à mander à Mr. Bailleul que je verray ce soir, & dont le Seigneur puisse assister la figure ? f. 2r Je ne pourray pas etre de votre diné de samedy, a cause de ma diette, & de l'academie ou il faut absolument que j'aille ce jour là.
A Madame
Madame la marquise de Crequy