Sélection de lettres
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    [Manuscrit autographe] (affichée) | |||||
Paris, collection Charles Gourdin
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    [Imprimé 1996] | |||||
John Pappas, Revue d'histoire littéraire de la France, 1996, p. 548-549
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D'Alembert (Paris) à Crequÿ (Froullay) Mme (Paris)
datée par les autres l. à Mme de Créquy et Mme Du Deffand du mois de janvier 1753.
f. 1rPardieu vous m'ecrivez sur de beau papier. Il n'y a que votre style au monde qui puisse faire passer du papier pareil. Je vais manger comme un diable vos perdrix. Eh bien nous avons donc des frondeurs, cela est fort bien fait : on me dit hier que de Boze & La Chaussee crioient beaucoup contre moy, quoyque je n'aye non plus pensé à faire leur Satyre que leur Eloge. Quels gens, et surtout quel climat ! Du pain, mordieu, et des bouffons, voila tout ce quil faut avec la Gazette et des perdrix tous les Lundis. Avec cela on vit en paix au milieu des louangeurs, des frondeurs, des Imprimeurs, des colporteurs &c &c &c. On me dit hier qu'a la cour on etoit fort content de mon Essay sur les gens de lettres ; si on ne m'a pas menti, c'est bien la joüer de malheur. A dieu, madame, purgez vous, vuidez f. 1v vous, & ne soyez jamais fachée de rien que du mauvais temps. Je fus samedi au pavillon, où je suis pour ce moment for en grace. Il etoit trop tard quand j'en sortis pour aller chez vous. Car nous nous echauffons reciproquement, & ce n'est pas le tout que d'avoir autant de chaleur qu'Helvetius, il faut dormir. Mondonville reussit, & les Bouffonistes en ont dans le cul. Dieu veuille que cela dure. J'envoyay hier chez Diderot qui n'a point la Prophetie. Ces sorciers là se moquent de nous.