Sélection de lettres
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    [Manuscrit autographe] (affichée) | |||||
Institut et Musée Voltaire, Genève, Ms. CC29, f. 26-27
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    [Imprimé 1799] | |||||
Œuvres posthumes de D'Alembert, tome premier, Charles Pougens, Paris, 1799, p. 170-173
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    [Imprimé 1805] | |||||
Œuvres philosophiques, historiques et littéraires de d'Alembert, Paris, J.F. Bastien, 18 vol., 1805, XIV, p. 308
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    [Imprimé 1821-1822] | |||||
Œuvres de D'Alembert, Paris, Martin BOssange & fils, A. Belin impr., 5 vol., 1821-1822, p. 25-26
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    [Imprimé 1865] (pdf) | |||||
Correspondance complète de la marquise du Deffand avec ses amis, éd. M. [Adolphe] de Lescure, Paris, Henri Plon, 1865, p. 165-166
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D'Alembert (Paris) à Du Deffand (Vichy Chamron) Mme (Mâcon)
Cette lettre fait clairement suite à 53.06 (datée par D'Alembert) et le millésime de 1752 indiqué par erreur de D'Alembert a été corrigé en 1753..
f. 26rJ'attends, madame, avec beaucoup d'impatience les remarques que vous me promettés. Je les crois d'avance fort justes, & je vous reponds de toute ma docilité. Le dechainement contre moi & contre mon ouvrage est prodigieux ; L'interêt que vous y prenez suffiroit pour m'en consoler, si je n'avois de la philosophie de reste pour supporter patiemment & ecouter tres indifferemment tout le mal que j'en entends dire. Mais ce qui vous surprendra, ce n'est pas tant le mal que j'ai dit des grands, que le bien que j'ai dit de la musique italienne, qui m'a fait une nuée d'ennemis. Je croyois qu'on pouvoit aimer jusqu'aux marionnetes inclusivement, sans que cela fit de tort a personne, mais je me suis trompé. Une faction puissante et redoutable, a la tête de laquelle sont Mrs. Jeliotte et le P. Henault, va clabaudant de maison en maison contre moi. Jugés de toute l'impression que cela m'a faite, & combien j'aurois besoin en cette occasion de mon stoicisme, si je n'avois cru devoir le garder pour des conjonctures encore plus importantes.
f. 26vM. de Forcalquier, dit-on, etoit aussi fort ulceré contre moi, je ne scai pas par quelle raison, pour celui la il est mort dieu merci, et nous n'entendrons plus dire a tout le monde ; comment se porte m. de Forcalquier comme s il etoit question de Turenne ou de Newton. Pour les Bissis et compagnie, je crois que c'est comme grands & comme mecenes qu'ils m'en veulent, quoiqu'on pût, comme vous dites fort bien, leur disputer ces titres. On dit que le comte de Bissi a pris pour lui le commencement de la p. 157 du 2.d volume ; cela ne le regarde pas plus qu'un autre ; mais il est vrai que cela lui convient assez. Vous voyés, madame, qu'il n'y a qu'heur & malheur. Vous me savez bon gré d'avoir evité la satyre dans mon ouvrage, et on me regarde icy comme le plus satyrique de tous les Ecrivains. Vis a vis de moi meme je n'ai rien à me reprocher, et vivant retiré et sans voir personne, que m'importent tous les discours qu'on tient ? Mon ouvrage est public, il s'est un peu vendu, les frais de I'impression sont retirés, les Eloges ou les critiques, et l'argent viendront quand ils voudront. J'ay fait avec mes libraires un assez plat marché, c'est qu'ils feront les frais, & que nous partagerons le profit. Je n'ay encore f. 27r rien touché. Je vous manderay ce que je gagneray. Il n'y a pas d'apparence que cela se monte fort haut. Il n'y a pas d'apparence non plus que je continüe a travailler dans ce genre. Je ferai de la Geometrie, et je lirai Tacite. Il me semble qu'on a grande envie que je me taise, & en verité je ne demande pas mieux. Quand ma tres petite fortune ne suffira plus à ma subsistance, je me retirerai dans quelque endroit ou je puisse vivre et mourir à bon marché. A Dieu, madame, estimez comme moi les hommes ce qu'ils valent, & il ne vous manquera rien pour etre heureuse.
P.S. on dit Voltaire raccommodé avec le Roy de Prusse, & Maupertuis retombé. Ma foy les hommes sont bien foux, à commencer par les sages.
à Paris 16 fev. 1752
f. 27vA Madame
Madame la marquise du Deffand, à l'Eveché
a Macon