f. 9rMonsieur,

J'etois à la séance de nôtre Société lorsqu'on y fit la lecture de vôtre lettre dans laquelle vous vous plaignés du discours du p. Tolomas. L'honneur que j'ay d'être correspondant de l'Académie des Sciences dont vous êtes un des principaux ornemens, la sincere estime dont je suis pénétré pour votre merite et vos ouvrages que j'ay lû et que je lis encore avec un nouveau plaisir m'engagent à vous donner dans cette occasion des preuves de mon zéle pour ce qui vous regarde. Je puis donc vous protester, Monsieur, que dans la harangue f. 9v du p. Tolomas à laquelle j'assistai et que j'écoutai attentivement je ne remarquai rien qui vous attaqua personnellement, rien qui ressentit l'invective et encore moins l'injure. L'auteur dans quelques endroits donna à vos talens et à vos succès les éloges quils meritent, du reste il s'en tint à son sujet.

Je vous prie, Monsieur, de vouloir bien ajouter foy à ce que j'ai l'honneur de vous dire : Si j'avois le bonheur d'être connu de vous, je me flatte que vous m'accorderiés cette grace sans peine : mais vous avés dans l'Academie quelques-uns de Messieurs les Académiciens qui ont des bontés pour moy et j'ose espérer quils voudront bien être au moins pour cette fois les garans de ma parole.

Nous avons eu depuis le commencement de l'année des froids excessifs. Vous en jugerés, Monsieur, par les observations que j'ay l'honneur de vous envoyer et qui peut être feront plaisir à l'Academie. Je me sers pour ces observations du Thermomêtre de M^r de Reaumur ou de plusieurs Thermomêtres de Mercure f. 10r construits à peu près sur les mêmes principes et qui ont tous la marche uniforme : tous ces Thermomêtres sont placés à la fenêtre Nord de nôtre observatoire. J'ay observé sur les six heures et demi du matin.

Le 5 fevrier, le froid fut donc selon le Thermometre de M^r de Reaumur de 1. deg.\(\frac{1}{4}\) et selon les Thermometres de mercure de 2. deg.\(\frac{1}{4}\) plus grand qu'en 1709.

Je suis avec tout le respect possible,
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur

Beraud, Jesuite.

Lyon 21 Fevrier 1755

f. 10vA Monsieur
Monsieur d'Alembert de L'Académie Royale des Sciences Rüe Michel le Comte
à Paris